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Âmes sensibles s’abstenir
Le 01/11/06

Un pays de contrastes

Alors, voilà parce qu’il faut bien en parler aussi et qu’aujourd’hui je suis particulièrement à vif, j’ai décidé de vous offrir une nouvelle version du Yémen, loin des « incroyables rencontres », et des « paysages magnifiques »...

Ce pays, le Yémen, est un vrai pays de contrastes, de contrastes géographiques, géologiques, biologiques, tout d’abord, que les scientifiques ne se lassent pas d’admirer. C’est aussi un pays de contrastes sociologiques, et une source de chocs culturels intenses pour le petit Occidental qui s’y aventure trop loin ou trop longtemps...

Si les femmes d’ici sont toutes voilées des pieds à la tête, et que la pudeur reste une vertu fondamentale, la présentation, l’apparence ou la « netteté » ne font pas pour autant l’objet d’une attention particulière...

mimicracra

Ainsi, comme nous l’avions mentionné dans d’autres articles, la gestion des ordures au Yémen est plus qu’approximative : elle est inexistante. Les sacs en plastique noirs remplis de déchets de bouche, les boîtes de conserve ouvertes, les papiers souillés, les bouteilles et autres canettes vides, les excréments d’animaux et d’humains aussi parfois jonchent la plupart des rues piétonnes (quasiment toutes les rues sont « piétonnes » à l’exception des grandes avenues - ce qui n’empêche pas pour autant les voitures d’y circuler cela dit...)

Ces ordures dans lesquelles les enfants courent pieds nus, dans lesquelles nous marchons en tongs toute la journée, et au-dessus desquelles les marchands de rue pèlent, coupent et préparent leurs frites, riz ou poulets, sont en outre le terrain de jeux favori de nombreuses créatures qui habitent la ville, au même titre que les humains.

Les chèvres tout d’abord...

L’idée de côtoyer des chèvres au centre-ville est intéressante : elle parle d’une logique de village au cœur de l’agglomération, de l’autosuffisance de la cellule familiale qui parvient encore à se nourrir sans plus posséder de terre, de la vie en communauté et du respect des animaux dans l’espace public... Par contre, si l’envie vous prend d’acheter un fromage, de manger un plat de chèvre bouillie comme on vous en propose souvent, pensez à la bête que vous venez de voir se nourrir d’un carton trempé d’un jus infâme et accommodé au sac plastique. Si elles sont bien « élevées en plein air », les chèvres du Yémen sont aussi élevées en enfer !

Les chats ensuite...

Par centaines, depuis notre arrivée près de la mer arabique, ils hantent les rues des villes balnéaires. Endormis dans les tas d’ordures, il arrive fréquemment qu’on manque de leur marcher dessus, tant leur pelage-camouflage noir et blanc est efficace dans ce décor de poussière et de sacs plastique. Faméliques, ils sont également sauvages et ne se laissent jamais approcher. Morts sur le bord de la route ou en train de se battre à coup de cris furieux, ils n’arrivent pas spécialement à attirer la sympathie des Yéménites qui les considèrent comme une peste proliférante, bien loin de l’image d’Épinal que l’industrie agroalimentaire nous offre de nos matous de compagnie, sédentaires, castrés et dépressifs...

Les rats enfin ?...

À Aden, le premier soir, en découvrant au bord de mer un petit port au clair de lune, nous avons aperçu dans les rochers brise-vagues de la digue des... petits chats... ? Non, c’étaient de gros rats, sûrs de leur bon droit, qui se baladaient au cœur d’une odeur de poisson pourri absolument insoutenable. Pour leur tenir compagnie, toute une faune composée d’insectes et de mammifères non identifiés, mais friands de ces ordures éparpillées, pullule sur ces fronts de mer à l’eau turquoise...

Plus loin sur la baie, les requins, qu’on peut déguster « au fromage », contribuent également à faire de ces plages urbaines, un véritable paradis...

Les chiens, ah oui aussi !

En pensant vous sauver, vous décidez de remonter dans la ville, de traverser le souk et de grimper au faîte des quartiers résidentiels qui ne manquent jamais de s’étager à flanc de colline... mais à peine arrivés là-haut, c’est aux chiens sauvages que vous aurez à faire ! La dernière maison à peine en vue, les voilà qui se mettent à aboyer et à gronder comme s’ils voulaient vous déchiqueter. En meutes, ils se disputent ce territoire aride qui surplombe la ville et que l’homme peine à coloniser. Vous tentez de leur jeter des cailloux pour les faire fuir, peine perdue, quelques-uns se retirent, mais d’autres restent : comme les rats, les chats, les chèvres, ces chiens-loups qui hurlent à mort au coucher du soleil, sont habitués à l’homme et vivent de leurs déchets... Il ne vous reste plus qu’à rebrousser chemin...

... sans oublier nos petits amis

Las de votre exploration urbaine, vous vous décidez alors à rentrer au funduk, mais devant votre chambre, n’oubliez jamais de traîner un peu sur le pas de la porte en l’ouvrant. Ce stratagème vous aidera peut-être à éviter d’apercevoir la fuite des cafards en tous sens, au moment où la lumière s’allume. De taille variable, ces charmants animaux de compagnie qui vivent aussi bien dans la rue que sous votre lit, peuvent aussi et sans complexe aucun, décider d’assister à votre toilette intime. Un seul conseil : aspergez alors à grands seaux votre hammam à la lumière faiblarde et... fermez les yeux !

Et pourtant... C’est au moment même où vous aurez fini par vous habituer à leur présence familière, que par dizaines, des mouches bourdonnantes et ultra stressantes se précipiteront sur votre couche afin de vous tenir compagnie, elles aussi, pour la nuit...

Au réveil, c’est avec perplexité que vous vous demanderez d’où viennent ces petites piqûres sur les mains et le dos... Vous n’avez vu ni entendu de moustiques pourtant... alors, des puces ?

quid des « mignons petits nenfants ? »

Non décidément les animaux, ce n’est pas votre fort. Les Yéménites sauront certainement récompenser votre persévérance d’Occidental choqué, par leur gentillesse légendaire et leur proverbial accueil. Il serait faux de prétendre que ces hommes, qui possèdent autant de kalachnikovs que nous de manteaux pour l’année, sont agressifs. Pour autant, leurs enfants, qui ne possèdent que des pistolets à eau... ou des cailloux, peuvent, eux, se révéler de véritables durs à cuire. Il est important de préciser que tant que vous possédez un mari sous la main, vous n’aurez jamais rien à craindre d’autre que de « hello-how are you-what’syourname... », assortis éventuellement des étranges « I love you-fuck you » ou de quelques ouvertures de sac à dos impromptues... mais un conseil, ne tentez pas la sortie seule, même voilée, dans des quartiers résidentiels élevés ! C’est en effet à coups de jets de pierre que vous serez reçus : jets de pierre sur les chiens pour les exciter avant de les lancer à votre poursuite, jets de pierre à vos pieds pour tenter de vous faire fuir, jets de pierre au visage pour tenter de vous faire réagir... Las, après avoir tout essayé, du dialogue aux cris dans plusieurs villes, je peux vous assurer qu’il n’y a rien à faire d’autre que de faire mine de ramasser vous aussi un caillou et de le lancer : la nuée se dispersera aussitôt... pour revenir se signaler quelques rues plus loin d’un autre caillou maladroitement envoyé. Des adultes vous regarderont le visage piteux et tenteront de les freiner un peu, avant de vous lancer, toujours un peu honteux,

« Welcome to Yémen ! »



Ca discute...

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