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Trujillo, coloniale, vivante et schizophrène
Le 22/06/07

La casa de Clara

La casa de Clara, une petite guesthouse recommandée dans tous les guides de voyage, est un peu excentrée par rapport au centre-ville. Mais il est précisé qu’il est possible d’y faire laver son linge et que les prix sont raisonnables, donc nous faisons une petite entorse à la « règle du centre ».

Lorsque nous y arrivons un peu tard, la nuit est déjà tombée. Nous ne pouvons plus reculer même si au premier coup d’œil nous nous rendons compte que l’ambiance ne nous plaît pas forcément et que les prix ont sacrément augmenté. Ce n’est pas grave cela dit, ça nous est déjà arrivé.
Demain est un autre jour et il sera bien temps de repartir.
Alors nous en profitons tout de même pour donner notre linge à laver. On nous assure qu’il sera bien prêt pour le lendemain à l’heure du « check out ».

Mais cette histoire de laverie qui commence comme une blague, quand on se rend compte que le linge est encore trempé au moment de partir de l’hôtel, tourne rapidement au festival de la blague.

Clara est en effet une de ces femmes que trop de critiques positives dans les guides de voyage (ces mêmes guides qui décident de la vie ou mort des aubergistes) ont gâtées. Elle est d’une hypocrisie sans borne et n’a plus de vraie pression pour assurer un service minimum, sans parler de service de qualité.
Après nous avoir fait attendre une première fois deux heures, dans la soirée qui a suivi, une livraison de linge qui n’est jamais venue, il a fallu plus de 3 coups de fil pour que le surlendemain elle se présente enfin à notre nouvel hôtel, avec deux énormes sacs de linge contenant les effets de tous les occupants de son auberge... sauf les nôtres !

Nous y sommes donc retournés en désespoir de cause quelque temps avant de partir pour Chiclayo, au bout de presque 3 jours d’attente. Les quelques oripeaux que nous n’avions pas mis à laver ce fatidique soir étaient maintenant raides de crasse.
Mais nos affaires « propres » étaient encore mouillées...

Un style colonial minimaliste ( !)

Cela dit, Trujillo, c’est loin d’être uniquement « Clara ».

Trujillo, c’est avant tout une ville coloniale dont Manu est tombé presque amoureux, alors que la plupart des backpackers la décrivent comme une ville « invivable, polluée et tentaculaire » (c’est la deuxième ville du pays, mais elle n’est pas si grande que ça...)
Et en fait, je suis presque d’accord avec mon homme. Cette ville a un charme vraiment particulier.
Ses façades coloniales possèdent un caractère indéniable et les intérieurs que nous avons eu l’occasion de visiter sont vraiment nouveaux pour nous. Les volumes simples des patios et des pièces qui s’organisent autour s’articulent le plus souvent autour d’une gamme de couleurs violentes, mais étrangement esthétiques, qui éclatent contre le gris parfois un peu pesant du ciel trop bas.
Les façades qui donnent dans la rue possèdent, elles aussi, ce charme subtil que procure l’ajout de quelques détails de fer forgé à un bel aplat de couleur franche. Le plus souvent, le rectangle horizontal jaune, bleu ou rose, qui s’aligne avec les rectangles voisins, n’est, en effet, percé que de deux éléments architectoniques significatifs :
Une lourde porte de bois sombre simplement travaillée, mais entourée d’un cadre de maçonnerie blanche qui contraste avec l’éclat de la couleur en toile de fond.
Et une très grande fenêtre de 2 à 3 m de haut pour environ un mètre de large, dont l’allège se situe toujours à moins d’un mètre du sol. Ces fenêtres sont remarquables dans la mesure où elles sont toutes « protégées » par un ouvrage de métal travaillé, qui peut être comparé de loin à une portion « cage à canari », qui, en marquant une petite avancée sur le trottoir, donne tout son relief à cette façade coloniale minimaliste.

Notre second hôtel possède un caractère particulièrement puissant, inspiré de cette grandeur coloniale. S’il affiche plusieurs étages sur rue, contrairement aux casas de la Plaza de Armas, il possède de la même manière les deux énormes patios qui caractérisent cette architecture conçue en « parcelles étroites », ainsi qu’une certaine monumentalité dans le traitement de l’entrée. Les plafonds ici sont vraiment très hauts et les moulures, qui décorent avec discrétion les énormes volumes de cet établissement un peu laissé à l’abandon, donnent à l’ensemble un charme de château hanté. Notre chambre énorme, parquet et peintures jaunies par le temps (un décor idéal pour un dîner aux chandelles - pourquoi se priver :)) donne sur la rue, en plein centre-ville.

Une belle occasion de nous rendre compte que, malgré la présence puissante d’une architecture datée, cette ville n’est pas figée dans le temps.

L’animation continue qui la fait vibrer en journée et qui se prolonge tard dans la nuit est bien contemporaine. À plusieurs reprises, nous y avons croisé des manifestations avec les mêmes revendications qu’à Chiclayo je crois, pour une « éducation gratuite ».
Si le tempérament contestataire des Péruviens est presque palpable au Pérou depuis notre arrivée, c’est toujours dans une sorte d’ambiance de fête, qui pourrait se rapprocher un peu de celle des processions, que se déroulent ces manifestations.

Un début de schizophrénie sympathique

Au cours de notre séjour à Trujillo, un peu comme à Chiclayo, je vais commencer à devenir schizophrène.
Nous vivons et nous dormons en journée dans une ville coloniale et contemporaine, tandis que nous nous échappons chaque jour aux cœurs de sites archéologiques qui nous plongent dans des univers absolument fantastiques, étrangers à tout ce qui fait la continuité de la ville.
Nous sommes en Amérique latine et c’est normal (voir article, « Amérique païenne, Amérique chrétienne ») : les époques se mélangent et se juxtaposent donc violemment.

Après Sipan nous découvrons donc ici un autre site de la culture Moché.
La Huaca del Sol et de la Luna.
Le centre religieux et administratif de cette culture.
Bien que moins impressionnant que les tombes de Sipan en pleine excavation, cette découverte n’en est pas moins fascinante pour moi. Je découvre sans cesse de nouvelles formes architecturales, liées à de nouvelles conceptions du monde... (Voir photos : Site archéologique : la Huaca del Sol)

La découverte, la veille, de la culture chimú, postérieure à la culture Moche, sur le site de Chan Chan, m’avait encore plus bouleversée. Sur plus de 40 hectares, les restes d’une ville entière conçue dans un style tout à fait nouveau pour moi s’étalent en avortons de murs de boue, arasés par des siècles de pluies de sable et de vents.
Vraiment, ça ne ressemble à rien de ce que j’ai vu auparavant, et c’est justement ça qui est fantastique. Les formes que je découvre ici sont extrêmement contemporaines (les murs en filets de pêche géants et très géométriques par exemple) et on se sentirait presque en communion avec ces peuplades qui ont été si brusquement éliminées de la carte du monde par l’arrivée des conquistadors... (Voir photos : Le site archéologique de Chan Chan )

Un adieu rapide à la côte

Huanchaco, un petit village de la banlieue de Trujillo nous accueille le dernier après-midi, sous un vent furieux. Une ambiance de festival flotte dans l’air. Les instruments sont de sortie dans la rue, des enfants déguisés et maquillés dansent au son de la fanfare avec grâce. Il me semble que partout en Amérique du Sud il y a des trompettes et des fêtes dans la rue...
Mais c’est surtout sur la plage que notre attention se porte. Groupés en bouquets gigantesques, de petits « kayaks » de paille tressée, semblables à ceux que les pêcheurs utilisaient il y a 2500 ans déjà, attendent d’être mis à l’eau par leurs propriétaires.
Les pêcheurs sont ici en effet tous des surfeurs et pêchent « sur la vague » la prise du jour. Nous en apercevons même un en pleine action à quelque cent mètres du rivage.

Demain, nous partons en montagne. Je ne sais pas trop ce qui nous attend. Mais, d’une chose je suis sûre, c’est que ce pays décidément, commence à m’impressionner...



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